Des millions de Vénézuéliens se rendent aux urnes dimanche pour une présidentielle tendue entre le sortant Nicolas Maduro, qui brigue un troisième mandat de six ans, et le discret diplomate Edmundo Gonzalez Urrutia.
Agence France-Presse
À la mi-journée, des files d’attente étaient formées devant de nombreux centres de vote, ont constaté des journalistes de l’AFP. Leur fermeture est prévue à 18 h, avec des résultats attendus dans la nuit. Le Conseil national électoral (CNE) pourrait prolonger l’ouverture de quelques heures, comme le permet la loi.
« Le vote est rapide, mais on attend longtemps dans la queue », raconte José Gregorio Raga, gérant de 58 ans, qui vote dans le quartier du 23 janvier à Caracas.
Les experts jugent que la participation est une des clés du scrutin, l’opposition ayant besoin d’une forte mobilisation pour l’emporter.
« Dans tous les centres de vote du pays, nous voyons une participation en apothéose. J’en suis très fière. Nous sommes en train de réaliser un rêve […] Nous allons être libre », a déclaré la cheffe de l’opposition Maria Corina Machado, qui n’a pas pu être candidate parce que déclarée inéligible.
Elle a été remplacée au pied levé par Edmundo Gonzalez Urrutia, 74 ans.
Le CNE n’a donné aucune indication chiffrée, mais selon Mme Machado, la participation à 13 h s’élevait à « 42,1 % ce qui représente 9,3 millions de personnes ». « C’est énorme et si ça se maintient, le chiffre [de participation] sera historique ».
Portant un survêtement aux couleurs du Venezuela, le président Maduro, 61 ans, a voté dès l’ouverture des bureaux à 6 h. « Je reconnais et je reconnaîtrai l’arbitre électoral, les communiqués officiels et je les ferai respecter », a-t-il promis alors que l’opposition craint des fraudes ou une manipulation.
« Continuer à avancer dans l’harmonie »
Le président sortant a décrit une « bataille […] entre ceux […] qui souhaitent la violence et ceux d’entre nous qui aiment le Venezuela, qui ont surmonté toutes les tempêtes et qui veulent continuer à avancer dans l’harmonie ».
Très applaudi au bureau de vote où il s’est déplacé en fin de matinée, M. Gonzalez Urrutia a assuré : « Nous sommes prêts à défendre jusqu’au dernier vote ». « La seule nouvelle importante, ce sont les millions de Vénézuéliens à travers tout le pays qui exercent leur droit de décider », a-t-il dit.
Griselda Barroso, avocate de 54 ans, s’est rendue à son bureau de vote à 4 h 30. « J’espère que la journée sera fructueuse et qu’Edmundo Gonzalez Urrutia triomphera. J’espère qu’il y aura de la démocratie » au Venezuela, dit-elle.
Dans le quartier 23 janvier, bastion du pouvoir, Maria de Rivero, 83 ans, se dit « Madurista » et fière du bilan du président sortant.
« Je suis avec lui […] tout va s’améliorer. Je suis heureuse parce qu’il y a eu beaucoup d’éducation, ce qui n’était pas le cas auparavant. Les pauvres, les enfants ne pouvaient pas entrer à l’université ».
Dans l’État pétrolier de Zulia, une étudiante assure elle que le pouvoir achète les votes. « Quand je suis allée voter, une femme se tenait à côté de la machine […]. Elle a fait signe à une autre personne pour lui dire que j’avais voté pour Edmundo », explique-t-elle.
Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a déclaré dimanche que « le peuple vénézuélien mérite une élection qui reflète réellement sa volonté, à l’abri de toute manipulation ».
« Après quoi ils ont apposé un autocollant jaune sur ma carte d’identité. Ils apposent un autocollant noir sur les cartes de gens ayant voté Maduro. Cet autocollant noir donne droit à un sac Clap [d’aide alimentaire] à la sortie du bureau de vote », raconte-t-elle.
Dix candidats sont en lice, mais le scrutin se résume à un duel entre Nicolas Maduro et Edmundo Gonzalez Urrutia.
Attitude de l’armée
Les sondages donnent l’opposition largement en tête (maximum de 30 % pour Maduro ; opposition entre 50 et 70 %). Le pouvoir, lui, se montre confiant en sa victoire.
Héritier d’Hugo Chavez, ancien président d’inspiration socialiste de 1999 jusqu’à sa mort en 2013, M. Maduro, qui s’appuie sur l’armée et un harcèlement policier de l’opposition, promet régulièrement qu’il ne cédera pas le pouvoir. Pendant la campagne, il a évoqué un possible « bain de sang dans une guerre civile fratricide provoquée par les fascistes ».
Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a déclaré dimanche que « le peuple vénézuélien mérite une élection qui reflète réellement sa volonté, à l’abri de toute manipulation ».
Le pays pétrolier, longtemps un des plus riches d’Amérique latine, est exsangue, empêtré dans une crise économique et sociale sans précédent : effondrement de la production pétrolière, PIB réduit de 80 % en dix ans, hyperinflation, pauvreté et systèmes de santé et éducatif totalement délabrés.
Le pouvoir accuse le « blocus criminel » d’être à l’origine de tous les maux. Les États-Unis avaient durci leurs sanctions pour tenter d’évincer M. Maduro après sa réélection contestée de 2018, lors d’un scrutin entaché de fraudes selon l’opposition, et qui avait débouché sur des manifestations sévèrement réprimées.
Une des clés sera l’attitude de l’appareil sécuritaire. « La force armée nationale bolivarienne me soutient », a affirmé M. Maduro. M. Gonzalez Urrutia s’est lui dit « convaincu que les forces armées veilleront à ce que la décision de notre peuple soit respectée ».
Radio Télé Vitamine